9 février 2018

actu des établissements

Urgence et mobilisation au collège Guy Môquet de Villejuif

Urgence et mobilisation au collège Guy Môquet de Villejuif

Le SNES-FSU 94 soutient la mobilisation et les demandes de moyens des personnels du collège Guy Môquet de Villejuif. Ci-dessous, leur témoignage et leurs demandes.

"L’année dernière, le personnel du Collège Guy Môquet de Villejuif avait été contraint d’entamer un mouvement de grève en raison de la décision du Rectorat de Créteil de nous supprimer une classe. Les conditions d’enseignement et d’encadrement étaient très difficiles, et ce n’est qu’après une semaine de grève que nous avions obtenu l’octroi de quelques heures nous permettant de reconstituer une classe, et de créer un « module-relais », dispositif permettant d’accompagner un petit groupe d’élèves décrocheurs, ou perturbateurs, sur plusieurs semaines.
Fin janvier, nous avons reçu la nouvelle Dotation Horaire Globale, qui nous supprime, cette fois, deux classes. On nous enlève 65h d’autonomie, ce qui implique la fermeture du module-relais. L’établissement a été plus calme en début d’année, mais ni les incidents entre élèves, ni les faibles résultats n’ont disparu. Le processus d’apaisement que nous avons enclenché, les projets pédagogiques auxquels nous réfléchissions, les perspectives optimistes pour les années à venir, tout cela a été réduit à néant.
Nous avons obtenu une audience à l’Inspection Académique le 30 janvier. La délégation de professeurs, accompagnée par un parent d’élève, une élue du département, deux représentants syndicaux départementaux du SNES et de FO, n’a obtenu aucune réponse à ses demandes. Alors que nous avons démontré qu’au vu du profil des élèves que nous accueillions (ULIS, UPE2A, élèves dont les parents ne sont pas francophones, élèves venant de catégories sociales défavorisées…), nous avions besoin de davantage de moyens que ce dont nous disposions, l’inspecteur d’académie n’a pu nous donner aucune réponse.
La veille de l’audience, un élève de troisième s’est fait violemment frapper devant la grille du collège par un individu extérieur à l’établissement, sous l’œil impuissant d’élèves et de surveillants démunis devant tant de violence car l’assaillant était accompagné de deux acolytes. L’élève a eu deux jours d’ITT.
Le jour de l’audience, à 16h, alors que la majorité des élèves était en train de quitter l’établissement, un homme âgé d’une trentaine d’années, a fait irruption dans l’établissement pour frapper un élève de troisième qui avait harcelé sa sœur. Il a menacé physiquement un surveillant, agressé physiquement deux professeurs, et n’est ressorti qu’après avoir dit qu’il reviendrait faire « le Bataclan 2 », et qu’il avait déjà fait de la prison. La police, arrivée sur les lieux quinze minutes après les faits, a pris le nom de l’homme, mais pour l’heure, nous n’avons aucune nouvelle de la procédure.
Le lendemain de l’audience, mercredi matin, après une assemblée générale des professeurs qui devait rendre compte de l’audience mais qui a été contrainte de n’évoquer que ces faits de violence extrême, les professeurs ont décidé de débrayer. Ils ont demandé à leur direction un droit de retrait : le constat était simple, ils étaient incapables d’assurer la sécurité des élèves, des personnels, d’eux-mêmes. La direction a eu beau menacer de nous mettre en grève, insister sur le fait qu’on laissait les élèves « à la rue », les professeurs étaient tellement choqués par l’absence de mesures à l’arrivée des élèves, qu’ils ont tenu bon et n’ont pas pris les classes. La direction a finalement accepté d’entendre que nous avions besoin d’aide pour sécuriser les bâtiments, mais ni la police ni les Équipes Mobiles de Sécurité du Rectorat ne se sont manifestées en ce mercredi matin. Nous avons du insister pour obtenir la venue de psychologues pour les élèves et les adultes, et des EMS. Les psychologues sont venues, le jeudi matin, mais n’ont vu que les adultes. Les EMS ne sont arrivées que dans l’après-midi, et ne sont revenues ensuite que le vendredi de 10h à 14h.
Les conditions dans lesquelles vivent nos élèves ne sont apparemment pas suffisamment mauvaises pour que l’Éducation Nationale alloue davantage de moyens à notre établissement.
Les résultats scolaires ne sont apparemment pas suffisamment faibles pour que l’Éducation Nationale alloue davantage de moyens à notre établissement.
L’intrusion de personnes menaçant de revenir commettre un acte terroriste n’est pas suffisamment inquiétante pour que l’Éducation Nationale alloue davantage de moyens à notre établissement.
La majorité des professeurs a entamé un mouvement de grève lundi 5 février pour réclamer les moyens dont nous avons besoin pour assurer notre mission de service public : transmettre les savoirs, aider les élèves à développer leurs compétences, préparer leur avenir social et professionnel. Nous sommes dans un établissement de « secteur 3 », la dernière marche avant le statut REP. Nous exigeons depuis plusieurs années l’attribution de ce statut. Des moyens pour accompagner les élèves (assistant social, infirmier, psychologue), des moyens pour stabiliser les équipes, des moyens pour accomplir notre mission. Nous ne voulons pas accepter que tant que notre établissement n’explose pas, il n’y a pas d’urgence. Il y a urgence : nos élèves ne sont pas idiots, ils ne sont pas méchants, ils ne sont pas sauvages. Il y a urgence : nous ne sommes pas en insécurité dans ce collège, mais la scolarité des élèves est en danger. Il y a urgence : si nous ne faisons rien, des générations entières d’enfants et d’adolescents seront gâchées.
Nous sommes en grève depuis trois jours, nous n’avons aucune nouvelle de nos autorités. Les écoles de Villejuif subissent, elles, la fermeture d’une dizaine de classe. Les écoles, collèges et lycées du Val de Marne subissent des coupures budgétaires catastrophiques. L’Éducation Nationale, malgré des annonces médiatiques trompeuses, subit en ce moment, la charge la plus terrible qui lui ait jamais été infligée.
Nous avons été menacés d’une attaque terroriste par un individu.
C’est l’abandon de tous ces élèves confiés au service public qui nous terrorise.

Des professeurs de Guy Môquet."